Manque d’oxygène :
 Poitiers à la bonne altitude

Le CHU de Poitiers dispose désormais d’une chambre hypoxique, où l’on peut faire varier le taux d’oxygène dans l’air. Les études menées intéressent aussi bien le milieu médical que celui du sport de haut niveau. Une première va démarrer sur le diabète.

Romain Mudrak

Le7.info

Imaginez, un matin vous êtes à Poitiers et, quelques minutes plus tard, vous vous retrouvez à 3 000 mètres d’altitude, rien qu’en franchissant une porte… Ce n’est pas de la magie mais de la technologie ! Le CHU de Poitiers s’est doté d’une salle hypoxique. Installée au Centre d’investigation clinique, elle est aménagée comme n’importe quelle chambre de soins, sauf qu’entre ses murs particulièrement épais et isolés de l’extérieur, se cache un dispositif permettant de réguler le taux d’oxygène dans l’air. Le tout contrôlé par un écran tactile.

« L’avantage est de pouvoir étudier et comprendre comment réagit l’organisme à une diminution de l’oxygène sans envoyer les patients à plusieurs centaines de kilomètres », souligne le 
Pr Pierre-Jean Saulnier. Cet expert en diabétologie au CHU s’apprête à lancer une étude originale intégrant ce dispositif. L’idée ? Savoir comment la glycémie, élément particulièrement surveillé pour ses patients, est régulée quand l’oxygène se raréfie. Une question d’autant plus importante que l’on sait maintenant qu’en vieillissant, nos capacités cardio-respiratoires diminuent et nos neurones manquent d’oxygène.
« Comprendre comment le corps s’adapte à un manque progressif d’oxygène pourrait nous donner des armes thérapeutiques, non pas contre le diabète, mais contre les risques de complications rénales et d’artères bouchées qui sont liés », précise le praticien. Il va utiliser pour cela les fameux patchs de contrôle de la glycémie qui évitent de se piquer quotidiennement le bout des doigts. Nous les avions présentés dans nos colonnes en novembre 2019, à l’occasion de la journée mondiale du diabète (Le 7 n° 466).

Milieux hostiles

Dans l’air ambiant, le taux d’oxygène est de 20% au niveau de la mer. Dans cette chambre hypoxique, il peut descendre progressivement à 14, voire 10%. Pas moins. Les patients y sont soumis plus ou moins longtemps selon l’étude. De quoi intéresser également les sportifs de haut niveau. En effet, soumettre l’organisme à des environnements hostiles permet aussi d’améliorer ses performances. L’équipe du laboratoire Move l’a bien compris. Cette unité de recherche rattachée à la faculté des sciences du sport de Poitiers s’intéresse à l’impact de l’activité physique sur les interactions cœur-cerveau. Un axe de travail baptisé « Extrême »
 est consacré au potentiel de la chambre d’hypoxie. « L’environnement hypoxique induit des contraintes sur l’organisme, qui vont pouvoir être utilisées pour entraîner encore plus des athlètes de haut niveau, explique le Pr Aurélien Pichon. On peut aussi reconditionner des patients, c’est-à-dire les aider à être en meilleure santé, notamment ceux qui pourraient avoir des syndromes métaboliques ou différentes atteintes du système cardiovasculaire. » Lui et son équipe de passionnés participent aussi à des études menées sur le long terme en Antarctique et sur les hauts plateaux du Pérou. Un doctorant vient de démarrer une thèse sur l’action combinée de l’hypoxie et du froid intense, grâce à une salle de cryostimulation basée sur le campus.

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