Enseigner autrement

Les pédagogies « alternatives » séduisent de plus en plus d’enseignants. Des établissements leur sont entièrement dédiés dans le privé, mais pas que... Des initiatives apparaissent également dans le public.

Romain Mudrak

Le7.info

Le bâtiment du nouveau collège privé Saint-Jacques- de-Compostelle commence à prendre forme dans le quartier de Saint-Eloi. De la surface des salles à leur disposition, l’architecture a été pensée dès l’origine pour coller à la pédagogie élaborée par l’équipe enseignante(*). A la rentrée prochaine, l’organisation du travail sera atypique. Un exemple ? 85 élèves intégreront la 6e dans... une seule et unique classe pilotée par plusieurs enseignants. « Des professeurs volontaires se sont nourris des connaissances sur les neurosciences et de plusieurs expériences menées ailleurs pour établir le projet pédagogique », souligne Laëtitia Quéneau, directrice adjointe du groupe scolaire qui chapeaute le collège.

L’équipe a réellement décidé de renverser tous les préceptes classiques. A tel point qu’il est difficile de résumer la méthode en quelques lignes. Exit les relations verticales prof-élèves ! Ici, le collège prône la pédagogie collaborative, l’évaluation par compétences, les cartes mentales, l’autonomie et même la sophropédagogie... Les temps de classe ne seront plus scindés en heures de cours et la récréation sera remplacée par une pause variable selon les individus. « Nous fixerons des objectifs à atteindre dans chaque matière tous les quinze jours. Les élèves les atteindront à leur rythme, avec l’aide de professeurs davantage en situation d’accompagnateurs », précise Laëtitia Quéneau.

Le public favorable à Freinet
Ce dernier point n’est pas sans rappeler la méthode Montessori, choisie par l’école catholique Salvert à Migné-Auxances. Mais une autre association envisage déjà la création d’une école semblable, à Poitiers cette fois. D’une manière générale, les établissements privés (1 300 élèves en primaire, 3 800 dans le secon- daire) sont disposés à adopter des pédagogies alternatives à tous les étages. Le directeur de l’enseignement catholique, Bernard Roux, a son explication : « Les chefs d’établissement disposent d’une large autonomie pour expérimenter. Ils ont vraiment la main pour chercher des solutions adaptées. De plus, élèves et parents doivent s’engager d’une certaine manière en adhérant au projet diocésain. » Maintenant, des enseignants du public osent aussi sortir du carcan de l’Education nationale pour utiliser d’autres méthodes. Depuis plusieurs années, les Rencontres autour du numérique constituent un lieu d’expression, une fois par an, pour les amateurs d’outils numériques innovants et de classes inversées de l’académie. De son côté, le Snuipp 86, syndicat majoritaire du premier degré, a ainsi organisé en février une journée « Enseigner autrement ». Le succès ne s’est pas fait attendre. Parmi les intervenants, Philippe Gilg est venu parler de la pédagogie Freinet, qu’il applique chaque jour au sein de l’école publique Coligny-Cornet, à Poitiers. « On part toujours du vécu de l’enfant pour donner du sens aux apprentissages. L’argumentation et l’interaction font aussi partie des bases. » Membre de la Fédération nationale Icem Freinet, il se félicite que l’Education nationale reconnaisse désormais sa méthode, aujourd’hui enseignée à l’Ecole supérieure du professorat et de l’éducation (Espé). Les mentalités évoluent.

(*)Les travaux ont pris du retard à cause de la météo. Le nouveau bâtiment ouvrira plutôt en janvier 2019.

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